
Née à Saint-Servan-sur-Mer, les légendes bretonnes ont bercé toute ma jeunesse. Les chevaliers de la Table ronde, Merlin, la Fée Viviane, la Fée Morgane, comme autant de graines mythologiques semées dans mon imaginaire d’enfant pour façonner ma sensibilité d’artiste.
C’est une tante de 10 ans mon aînée qui m’initie au dessin. Son coup de crayon était sûr, juste, élégant et j’éprouvais un immense plaisir à partager ces moments privilégiés en sa compagnie. Je chéris aujourd’hui encore le souvenir des heures passées à ses côtés, appliquée à reproduire ses créations.Peu à peu, le dessin se fait moyen d’expression. Étiquettes de vins, boîtes de camembert, affiches de cinéma, jaquettes de livres, cartes de vœux, etc., les objets du quotidien deviennent tour à tour matières premières, sources d’inspiration, terrain de jeu. Je copie, j’invente, je dessine. En un mot, je crée.
Je m’initie progressivement à la peinture, un art que j’apprivoise et pratique avec une insatiable envie. À 16 ans, je veux entrer aux beaux-arts mais la vie en décide autrement. À 26 ans, je m’inscris aux cours libres des beaux-arts de Rouen où je fais 2 ans de dessin pur, avec beaucoup de natures mortes et de nus. Je découvre toutes les techniques, comme le fusain, les pastels, les encres, la sanguine, etc. Plus que jamais, le dessin est omniprésent dans ma vie mais je me sens irrésistiblement attirée par la peinture, art dans lequel je me lance corps et âme. Je délaisse la peinture à l’huile de mes débuts pour l’acrylique, une technique qui me convient mieux car elle sèche plus vite, ne craquelle pas et présente moins de contraintes.
Ma vie de peintre commence alors vraiment. La première période est faite de marines très épurées, de paysages puis suivent des Magritte, des trompes l’œil, des drapés, des vanités. Je m’essaie à tout. Le dessin n’est jamais loin. Le figuratif est partout.
Mes toiles se lisent comme des histoires, des témoignages : récits de gentes dames, souffrance de femmes, de guerriers, souvenirs d’enfance, vanité de l’homme, amour, mort. Très influencée par le monde onirique, le symbolisme, le surréalisme, j’aime la poésie, le verbe, la musique. Léo Ferré, Reggiani, Jean Louis Murat (notamment le disque « Madame Deshoulières ») résonnent inlassablement dans mon atelier. J’attache beaucoup d’importance aux titres de mes toiles. La clef du mystère qui entoure mes œuvres y est souvent cachée.
Parallèlement à mon activité de peintre, je crée des publicités, des timbres, des cartes postales, des jaquettes de livres, des illustrations de journaux, etc. Je donne des cours, je peins des murs en trompe l’œil et depuis quelques années, je relooke des mannequins de récupération dans différents styles : Steampunk, Solarpunk, Lunapunk.
La créativité est le feu qui nourrit l’âme de l’artiste. À l’instar du feu, la créativité aussi doit être entretenue, alimentée. Je fais donc beaucoup de recherches. Mes dernières œuvres sont d’ailleurs l’expression de techniques très personnelles. J’ai encore beaucoup d’idées, beaucoup de choses à découvrir, à essayer, à partager.
Le plus important pour moi, ce sont les émotions. Je ne suis qu’émotion quand je peins et mon seul désir est de susciter l’émoi du spectateur.
Guylène
J’aime lire et relire ce texte du peintre japonais Hokusai :
« Depuis l'âge de six ans, j'avais la manie de dessiner la forme des objets. Vers l'âge de cinquante ans, j'avais publié une infinité de dessins, mais tout ce que j'ai produit avant l'âge de soixante-dix ans ne vaut pas la peine d'être compté. C'est à l'âge de soixante-treize ans que j'ai compris à peu près la structure de la nature vraie, des animaux, des herbes, des arbres, des oiseaux, des poissons et des insectes. Par conséquent, à l'âge de quatre-vingts ans, j'aurai fait encore plus de progrès; à quatre-vingt-dix ans, je pénétrerai le mystère des choses; à cent ans je serai décidément parvenu à un degré de merveille, et quand j'aurai cent dix ans, chez moi, soit un point, soit une ligne, tout sera vivant.
Je demande à ceux qui vivront autant que moi de voir si je tiens parole. Écrit à l'âge de soixante-quinze ans par moi, autrefois Hokusai, aujourd'hui Gadyôrôjin, le vieillard fou de dessin ».